vendredi 31 mai 2019

Le toponyme de La Turballe


LE TOPONYME DE LA TURBALLE






La première indication écrite du nom de La Turballe en tant que lieu dit habité date de 1452. Plusieurs interprétations, plus ou moins dignes de foi, depuis une centaine d'années, ont été émises  sur l'etymologie du nom : le nom de La Turballe serait, selon les auteurs, d'origine grecque, scandinave, latine, bretonne, française sans que pour autant le mystère du nom soit éclairci.

Pour Aristide Monnier1, d'abord, en 1891, le nom de la commune se rattacherait au grec turbé : agitation et halios : la mer2. Il signifierait donc agitation de la mer. Mais l'absence de comptoir grec fondé sur le territoire de La Turballe, laisse sceptique.
Selon Bruno Renoult3, La Turballe pourrait être d'origine scandinave et serait à rapprocher du vieux scandinave Thorboel , qui signifie « la cour du Dieu Thor », dieu du tonnerre dans la mythologie nordique. La Turballe serait ainsi un lieu dédié à ce dieu. Mais l'hypothèse, d'un point de vue linguistique, est difficile à étayer.
L'archiviste Léon Maître4 avance, lui, une autre hypothèse. La Turballe tirerait son origine du latin  turris : la tour » et désignerait une tour ou un sémaphore gallo-romain. François Reyniers rattache, lui aussi, la Turballe au latin et rapproche le nom de la commune de la Turbie (tropaeum Augusti), monument érigé par Auguste, près de Nice, en l'an VI avant J-C pour commémorer sa victoire sur les tribus alpestres. La Turballe serait ainsi un site où aurait été érigé un monument commémoratif, un trophée. Mais les preuves archéologiques manquent pour accréditer cette hypothèse.
Le nom de la commune, selon R. Fréhel et Fernand Guériff5, serait d'origine française, signifierait « vallée de la tourbe ». L'hypothèse s'appuie sur la présence géologique de tourbe à Pen Bron et à Brandu. De la tourbe a été, en effet, découverte, à 2 mètres de profondeur en grande quantité, en 1886, par René Fagault, directeur de l'usine Pellier, en faisant creuser un réservoir dans le jardin de sa propriété de Belmont, près du Brandu . D'autre part, près de la falaise de Pen Bron, sous les sables, la présence d'une couche tourbeuse et compacte de 45 centimètres d'épaisseur, a été constatée par les entrepreneurs Lemut et Guérin en creusant la falaise de l'hôpital et par les ouvriers en creusant les fondations de l'usine Pellier. Mais une question se pose : pourquoi le nom de la commune serait-il issu d'une particularité géologique, ponctuelle dans le paysage, non d'une caractéristique majoritaire, le sable et les espaces dunaires dominant sur le territoire de la commune ? L'hypothèse ne tient pas la rampe.
La Turballe pourrait aussi être emprunté au breton6. Deux éléments entreraient dans sa composition : Treff et Pol, l'ensemble signifierait « Trève de saint Paul ( Aurélien) ». L'hypothèse se heurte à une difficulté linguistique et historique: le saint né en Grande Bretagne au VIème siècle, l'un des sept fondateurs de la Bretagne, n'a pas été honoré sur le territoire de la commune. Elle ne saurait donc être retenue.
Reste une autre hypothèse, la plus plausible : La Turballe serait lié au bas latin et à l'ancien français7. Le nom pourrait venir du latin tripalium8, en bas latin trepalium,qui désignait à Rome
un instrument à trois pieux, servant d'instrument de torture pour les esclaves. La Turballe renverrait à des pieux plantés en grève pour amarrer les bateaux ou à des portiques pour tirer les filets de pêche. Mais cette explication qui s'accorde, certes, avec l'activité locale de la pêche et que la présence d'un gibet dans les environs vient renforcer est affaiblie par une difficulté linguistique ( évolution intervocalique du p).
Une autre hypothèse mérite un examen attentif. La Turballe viendrait d'un ancien nom français féminin triballe9 et aurait désigné, au moyen-âge, une auberge isolée, un «  cabaret où l'on buvait sans s'asseoir », autour duquel se serait formé un hameau. C'est l'hypothèse aujourd'hui la plus couramment admise, la date et le genre du mot plaident en sa faveur.


Le nom de La Turballe a, donc, donné lieu à diverses interprétations plus ou moins crédibles, aurait diverses origines. Même si la dérivation de l'ancien français du nom est à ce jour l'option la plus validée10, si La Turballe renvoie sans doute. à une ancienne auberge médiévale isolée, fréquentée par les paludiers, noyau d'un hameau, l'étymologie est obscure et reste, encore à ce jour, une énigme à percer.
1A. Monnier. Le Pouliguen et ses environs. Études et souvenirs. Angers. 1891. p.15-16
2A.natole Bailly. Dictionnaire grec-français. Hachette. Ed. 1963
3B. Renoult. Les Vikings en Bretagne. Moscou. Université de Konisberg/Kalingrad. 1985. p. 49
4L. Maître.   Guérande et la contrée guérandaise. Géographie, origines, antiquités. Nantes. Ed.Grimaud. 1894. p.25
5R. Frehel et F. Gueriff. Saint-Nazaire et la côte d'Amour. Notices géographique et historique. s.d.n.l. p. 14, chapitre B.
6J.L Duchêne. Toponymie dans F.Gueriff, G. Villais, JL Duchêne. La Turballe, monographie historique. Saint-Nazaire. A.P.H.R.N. 1976-1979, t.I, p. 18.
7Gildas Buron, conservateur du Musée intercommunal des Marais Salants à Batz-sur-Mer défend cette hypothèse. La Turballe : les hommes, le terroir, la mer . Imprimerie Lepape. Le Croisic. 1996. p. 15-18
8Felix Gaffiot. Dictionnaire latin-français. Hachette . Ed.2000. Ce mot est à l'origine du nom travail.
9F. Godefroy. Dictionnaire de l'ancienne langue française et de tous ses dialectes du IXème au XVème siècle. Paris. H. Champion. 1895. t.8, p.67
10Gildas Buron voir note 7 privilégie cette dernière et récuse les versions grecque, latine, scandinave, bretonne, française...

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