LE TOPONYME DE LA TURBALLE
La première indication
écrite du nom de La Turballe en tant que lieu dit habité date de
1452. Plusieurs interprétations, plus ou moins dignes de foi, depuis
une centaine d'années, ont été émises sur l'etymologie du
nom : le nom de La Turballe serait, selon les auteurs, d'origine
grecque, scandinave, latine, bretonne, française sans que pour
autant le mystère du nom soit éclairci.
Pour Aristide Monnier1,
d'abord, en 1891, le nom de la commune se rattacherait au grec
turbé : agitation et halios : la mer2.
Il signifierait donc agitation de la mer. Mais l'absence de comptoir
grec fondé sur le territoire de La Turballe, laisse sceptique.
Selon Bruno Renoult3,
La Turballe pourrait être d'origine scandinave et serait à
rapprocher du vieux scandinave Thorboel , qui
signifie « la cour du Dieu Thor », dieu du tonnerre
dans la mythologie nordique. La Turballe serait ainsi un lieu dédié
à ce dieu. Mais l'hypothèse, d'un point de vue linguistique, est
difficile à étayer.
L'archiviste Léon
Maître4
avance, lui, une autre hypothèse. La Turballe tirerait son origine
du latin turris : la tour » et désignerait
une tour ou un sémaphore gallo-romain. François Reyniers rattache,
lui aussi, la Turballe au latin et rapproche le nom de la commune de
la Turbie (tropaeum Augusti), monument érigé par Auguste,
près de Nice, en l'an VI avant J-C pour commémorer sa victoire sur
les tribus alpestres. La Turballe serait ainsi un site où aurait été
érigé un monument commémoratif, un trophée. Mais les preuves
archéologiques manquent pour accréditer cette hypothèse.
Le nom de la commune,
selon R. Fréhel et Fernand Guériff5,
serait d'origine française, signifierait « vallée de la
tourbe ». L'hypothèse s'appuie sur la présence géologique de
tourbe à Pen Bron et à Brandu. De la tourbe a été, en effet,
découverte, à 2 mètres de profondeur en grande quantité, en 1886,
par René Fagault, directeur de l'usine Pellier, en faisant creuser
un réservoir dans le jardin de sa propriété de Belmont, près du
Brandu . D'autre part, près de la falaise de Pen Bron, sous les
sables, la présence d'une couche tourbeuse et compacte de 45
centimètres d'épaisseur, a été constatée par les entrepreneurs
Lemut et Guérin en creusant la falaise de l'hôpital et par les
ouvriers en creusant les fondations de l'usine Pellier. Mais une
question se pose : pourquoi le nom de la commune serait-il issu
d'une particularité géologique, ponctuelle dans le paysage, non
d'une caractéristique majoritaire, le sable et les espaces dunaires
dominant sur le territoire de la commune ? L'hypothèse ne tient
pas la rampe.
La Turballe pourrait
aussi être emprunté au breton6.
Deux éléments entreraient dans sa composition : Treff et Pol,
l'ensemble signifierait « Trève de saint Paul ( Aurélien) ».
L'hypothèse se heurte à une difficulté linguistique et
historique: le saint né en Grande Bretagne au VIème siècle, l'un
des sept fondateurs de la Bretagne, n'a pas été honoré sur le
territoire de la commune. Elle ne saurait donc être retenue.
Reste une autre
hypothèse, la plus plausible : La Turballe serait lié au bas
latin et à l'ancien français7.
Le nom pourrait venir du latin tripalium8,
en bas latin trepalium,qui désignait à Rome
un instrument à trois
pieux, servant d'instrument de torture pour les esclaves. La Turballe
renverrait à des pieux plantés en grève pour amarrer les bateaux
ou à des portiques pour tirer les filets de pêche. Mais cette
explication qui s'accorde, certes, avec l'activité locale de la
pêche et que la présence d'un gibet dans les environs vient
renforcer est affaiblie par une difficulté linguistique ( évolution
intervocalique du p).
Une autre hypothèse mérite un examen
attentif. La Turballe viendrait d'un ancien nom français féminin
triballe9
et aurait désigné, au moyen-âge, une auberge isolée, un «
cabaret où l'on buvait sans s'asseoir », autour duquel se
serait formé un hameau. C'est l'hypothèse aujourd'hui la plus
couramment admise, la date et le genre du mot plaident en sa faveur.
Le nom de La Turballe a, donc, donné
lieu à diverses interprétations plus ou moins crédibles, aurait
diverses origines. Même si la dérivation de l'ancien français du
nom est à ce jour l'option la plus validée10,
si La Turballe renvoie sans doute. à une ancienne auberge médiévale
isolée, fréquentée par les paludiers, noyau d'un hameau,
l'étymologie est obscure et reste, encore à ce jour, une énigme à
percer.
1A.
Monnier. Le Pouliguen et ses environs. Études et souvenirs.
Angers. 1891. p.15-16
2A.natole
Bailly. Dictionnaire grec-français. Hachette. Ed. 1963
3B.
Renoult. Les Vikings en Bretagne. Moscou. Université de
Konisberg/Kalingrad. 1985. p. 49
4L.
Maître. Guérande et la contrée guérandaise.
Géographie, origines, antiquités. Nantes. Ed.Grimaud. 1894.
p.25
5R.
Frehel et F. Gueriff. Saint-Nazaire et la côte d'Amour. Notices
géographique et historique. s.d.n.l. p. 14, chapitre B.
6J.L
Duchêne. Toponymie dans
F.Gueriff, G. Villais, JL Duchêne. La Turballe,
monographie historique.
Saint-Nazaire. A.P.H.R.N. 1976-1979, t.I, p. 18.
7Gildas
Buron, conservateur du Musée intercommunal des Marais Salants à
Batz-sur-Mer défend cette hypothèse. La Turballe : les
hommes, le terroir, la mer . Imprimerie Lepape. Le
Croisic. 1996. p. 15-18
8Felix
Gaffiot. Dictionnaire latin-français. Hachette . Ed.2000. Ce
mot est à l'origine du nom travail.
9F.
Godefroy. Dictionnaire de l'ancienne langue française et de tous
ses dialectes du IXème au XVème siècle. Paris. H. Champion.
1895. t.8, p.67
10Gildas
Buron voir note 7 privilégie cette dernière et récuse les
versions grecque, latine, scandinave, bretonne, française...
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